13ème édition
9 ET 10 OCTOBRE 2024
Paris - Porte de Versailles Hall 2.2

Le salon des solutions et applications mobiles

Un réseau 4G sur la lune !

La Lune va bien avoir son propre réseau 4G grâce à ce robuste rover lunaire De nos jours, les réseaux 4G sont déjà capables d'atteindre certains des endroits les plus reculés de la planète. Aujourd'hui, les acteurs du secteur des télécommunications se préparent toutefois à un nouveau défi, d'une complexité jamais égalée : doter la Lune de son propre réseau 4G. Il s'agit d'une gageure pour la NASA, qui prévoit d'établir une présence humaine durable sur la Lune d'ici la fin de la décennie, dans le cadre de son programme Artemis. Un tel projet s'accompagne inévitablement d'une foule de problèmes logistiques. Si la nourriture, le sommeil ou la conception des combinaisons spatiales sont les premiers éléments qui viennent à l'esprit, une communication appropriée est tout aussi importante pour la vie dans l'espace. C'est pourquoi, alors que les réseaux 4G – et la technologie LTE qui les sous-tend – ont déjà prouvé leur résilience sur Terre, la NASA s'est adressée l'année dernière à l'un des principaux fournisseurs de télécommunications, Nokia. Avec une demande inhabituelle : concevoir un système permettant d'établir un réseau 4G qui sera utilisé par les futurs astronautes sur la Lune. La 4G préférée au Wi-Fi Reste que l'idée d'un espace équipé d'internet n'est pas nouvelle. Les astronautes de la Station spatiale internationale (ISS), par exemple, utilisent le Wi-Fi depuis 2008, et peuvent désormais connecter même leur combinaison spatiale au réseau pour diffuser des vidéos depuis l'espace, communiquer avec d'autres véhicules extraterrestres ou faciliter les procédures d'amarrage. La NASA a également développé un logiciel propriétaire pour permettre les communications entre l'espace et la Terre, via un vaste réseau d'antennes et de satellites relais, pour transmettre les données sur des milliards de kilomètres jusqu'au sol. Les nouveaux projets de l'agence spatiale et de Nokia diffèrent légèrement, dans la mesure où le constructeur scandinave a été chargé de mettre en place un réseau local sur la Lune, qui ne s'étendra que sur environ cinq kilomètres, pour permettre la communication entre les astronautes et les équipements au sol. « Dans leur vie personnelle, les astronautes ont des smartphones – alors quand ils vont dans l'espace, pourquoi n'auraient-ils pas accès aux mêmes capacités pour leurs besoins de communication et de collaboration ? », explique Thierry Klein, responsable du laboratoire de recherche sur l'automatisation industrielle aux Nokia Bell Labs, interrogé par ZDNet. Et d'expliquer qu'un réseau 4G permettrait aux astronautes de bénéficier d'un débit plus élevé, d'une latence plus faible et d'une plus grande portée qu'avec le Wi-Fi. Un réseau expérimental Le réseau prendra en charge diverses applications de transmission de données, allant des communications vocales et vidéo ordinaires au contrôle à distance des rovers lunaires, en passant par la navigation en temps réel et la diffusion de vidéos haute définition. Si, pour l'instant, la NASA envisage surtout d'utiliser la 4G lunaire pour des expériences, le scientifique n'hésite pas à voir grand. « A l'avenir, au fur et à mesure que nous établirons une présence à plus long terme sur la Lune et que nous construirons davantage de communautés, et peut-être à l'avenir sur Mars, les besoins en communication vocale seront plus importants », explique-t-il. Dans un avenir proche, cependant, l'accent reste mis sur le fonctionnement fiable de la technologie dans le cadre d'une première mission sans équipage prévue pour 2022, afin de tester l'état de préparation de la technologie et de valider certaines des applications clés avant que l'infrastructure 4G de Nokia puisse être utilisée par de véritables astronautes à une date ultérieure. Partenariat avec Intuitive Machine Pour transporter la technologie 4G sur la lune, Nokia travaille avec la société Intuitive Machines, qui construit un atterrisseur lunaire pour transporter le système de communication LTE dans l'espace et acheminer en toute sécurité l'équipement du réseau sur la surface lunaire. Nokia équipe l'atterrisseur d'Intuitive Machine d'une station de base LTE semblable à celles que l'on trouve dans les réseaux 4G terrestres, qui se configurent d'elles-mêmes au moment du déploiement – mais dans ce cas, la station sera transformée en une seule unité compacte intégrant plusieurs composants de réseau, comme les fonctionnalités EPC (Evolved Packet Core) et les antennes RF. L'atterrisseur déploiera ensuite un rover qui repartira avec l'équipement de l'utilisateur. « L'équivalent d'un smartphone, mais durci pour les conditions spatiales », précise Thierry Klein – et une antenne omnidirectionnelle qui se reliera à la station de base et établira effectivement une connectivité 4G. Une connexion satellite sera ensuite utilisée depuis l'atterrisseur pour communiquer avec le centre de contrôle de la mission sur Terre, d'où les commandes seront envoyées et les équipements du réseau seront gérés à distance. Une entreprise inédite A première vue, donc, le processus semble simple et assez similaire au déploiement d'un réseau conventionnel. Méfiez-vous toutefois des apparences : comme l'explique Thierry Klein, les contraintes de l'espace impliquent que chaque détail doit être soigneusement planifié. Viennent d'abord le lancement et l'atterrissage. « Le système doit être mécaniquement robuste pour le lancement et l'atterrissage, afin de résister aux chocs, aux vibrations, aux accélérations et à toutes les contraintes mécaniques liées à son déploiement dans l'espace », explique le responsable chez Nokia Bell Labs. Même une fois que l'atterrisseur a atteint la surface lunaire, le système doit être prêt à faire face aux variations de température extrêmes de l'espace, ainsi qu'aux caractéristiques du terrain qui sont spécifiques à la Lune – allant de la propagation radio différente aux rochers, montagnes et cratères, poursuit ce dernier. Vient également la question de la taille, du poids et de la puissance, qui doivent tous être réduits au minimum lorsqu'on s'aventure dans l'espace. « Vous voulez de la fiabilité, et nous avons intégré la redondance dans le système, mais vous devez trouver un équilibre avec la taille, le poids et la consommation d'énergie », explique Thierry Klein. « Un travail important est consacré à l'intégration du système, afin de réduire au maximum tous ces éléments. » Des tests rigoureux Il va sans dire que le système est soumis à toutes sortes de tests rigoureux. Dans des chambres d'essai, l'équipement a été soumis à une série de 25 expériences impliquant différentes accélérations et vibrations, mais aussi des températures, des niveaux de rayonnement et même un vide opérationnel. De plus, avec un certain nombre de paysages étranges, semblables à ceux de la Lune, même sur la planète Terre, Nokia a sorti le système en plein air pour évaluer les performances de la technologie sur la terre ferme. A titre d'exemple, dans l'archipel des Canaries, en Espagne, l'île de Fuerteventura présente un paysage volcanique dont la configuration est similaire à celle de la Lune. Thierry Klein et son équipe se sont rendus sur place et ont déployé le matériel, vérifiant les performances des antennes à différentes hauteurs et configurations, dans un environnement dépourvu d'arbres ou de bâtiments. Mais plus encore que de s'assurer de la survie du matériel, explique Thierry Klein, c'est l'éventualité de problèmes logiciels qui l'empêche de dormir la nuit. En effet, si le système tombe en panne pour une raison quelconque, envoyer un technicien pour y jeter un coup d'œil ne sera pas vraiment une option. « Nous faisons de la maintenance à distance sur Terre, bien sûr, mais vous avez toujours la possibilité d'envoyer quelqu'un sur place », explique le scientifique. « Une fois que ce réseau sera lancé, nous devrons être absolument capables de le faire fonctionner à distance. » Un projet en bonne voie A cet effet, Thierry Klein ajuste et affine constamment la suite logicielle d'exploitation et de maintenance de Nokia, pour permettre à l'équipe de redémarrer, d'effectuer des changements de configuration et de gérer le réseau lunaire à distance – tout en sachant que certains contretemps ne manqueront pas de se produire, sans aucun moyen de s'y préparer à l'avance. « En fin de compte, la seule chose à faire est de voler et de le tester pour de vrai", affirme ce dernier. Le timing est agressif : l'ingénieur et son équipe ont eu deux ans entre le moment où Nokia a été sélectionné et le premier lancement ciblé. Ce n'est pas beaucoup de temps pour préparer l'arrivée de la 4G/LTE sur la Lune, mais le projet est en bonne voie pour respecter les délais, assure Thierry Klein. Il semble donc que, dans les années à venir, même la Lune connaîtra sa propre transformation numérique. Source : www.zdnet.fr/